Coup de projecteur sur Lyon à travers son histoire

Christiane Goor,
30-09-2022
Plus de 2000 ans déjà que les hommes se sont installés sur le site de Lyon et au fil des siècles, ils ont bâti et élargi une ville dont toutes les étapes de développement sont encore visibles aujourd’hui. C’est ce rare témoignage de la continuité de l’urbanisation que l’UNESCO a voulu saluer. Une histoire urbaine en marche que je vous invite à découvrir.

La colline de Fourvière qui surplombe le Vieux-Lyon.

C’est sur la butte occupée par des Gaulois en surplomb de la Saône que la colonie romaine de Lugdunum a été fondée en 43 avant notre ère.

Colline de Fourvière vue de la Place Bellecour Bruno Herold

Idéalement positionnée au carrefour des grandes voies romaines et à la croisée du Rhône et de la Saône, la ville devient rapidement la capitale des Trois Gaules. Il faut pourtant attendre 1933 pour qu’un ensemble unique de monuments de spectacles composé d’un théâtre et d’un odéon soit mis à jour. Le Grand Théâtre, le plus ancien théâtre antique gallo-romain de France, édifié en 15 avant notre ère était adossé à la colline et composé de gradins en pierre où quelque 10000 spectateurs pouvaient prendre place. Aujourd’hui il accueille tous les étés les spectacles donnés lors des Nuits de Fourvière. Le Petit théâtre voisin érigé au 2ème siècle abritait des spectacles plus intimistes de musique ou de lectures publiques de poésie. Il faut y grimper quand le ciel est bleu car l’esplanade en haut de la colline offre le plus beau point de vue sur Lyon.

Le charme du Vieux-Lyon

Quand on descend de Fourvière à pied par la côte raide et étroite du Gourguillon, on rejoint le quartier St-Georges où s’installèrent dès le 15ème siècle les premiers artisans tisseurs de soie qui marquent le début d’une entreprise florissante.

Escalier dans le Vieux Lyon Kealia

St-Georges mais aussi St-Jean et St-Paul, les 3 paroisses du Vieux-Lyon, pris en étau entre la colline de Fourvière et la rive droite de la Saône, deviennent le centre de la ville au Moyen-Âge et à la Renaissance. Dès le 15ème siècle Lyon possédait quatre foires annuelles de quinze jours chacune qui attiraient des marchands de toute l’Europe et avec eux des banquiers pour la plupart italiens qui installèrent des succursales.  Ce sont eux qui ont édifié dans les venelles étroites du quartier des centaines de demeures particulièrement hautes en créant des traboules, à savoir des passages privés permettant de passer d’une rue à l’autre en traversant des cours intérieures qui dévoilent un escalier à vis abrité dans une tour plus haute que les bâtiments eux-mêmes. Entièrement réhabilité grâce à Malraux, le quartier du Viaux-Lyon multiplie bouchons, bars et boutiques, attirant les visiteurs du monde entier comme en écho aux foires d’antan.

Place Saint Jean, Lyon Laurent - stock.adobe.com

Incontournable, la place St-Jean où s’élève la cathédrale St-Jean dont pinacles et balustrades ajourées soulignent la façade qui offre une belle unité en art roman avec un élan gothique. Quand on lui tourne le dos, le regard est inévitablement attiré par la basilique de Fourvière qui surplombe la colline verdoyante.

La Presqu’île et ses multiples places

La Presqu’île étire entre Saône et Rhône une longue bande de terre de quelque 5 km, du pied de la colline de la Croix-Rousse jusqu’au confluent entre les deux fleuves.

Centre administratif et commercial de la ville depuis la fin du Moyen-Âge, elle connaît son apogée aux 18 et 19ème siècles quand deux artères jalonnées de places percent le quartier sur sa longueur.

La place Bellecour au centre de laquelle se dresse la statue équestre de Louis XIV fut la plus vaste place (6 hectares !) d’Europe jusqu’à la création de la place Concorde à Paris. Les Lyonnais ont l’habitude de s’y donner rendez-vous sous la queue du cheval ! Juste à côté, la place des Célestins où s’élève un théâtre à l’italienne est très fréquentée pour son ambiance intimiste créée par les bancs qui s’étirent à l’ombre de magnolias.

La place de l’Hôpital côté Rhône borde l’ancien hôpital du 18ème siècle qui brillait jadis par ses techniques médicales de pointe. Il a été entièrement réhabilité en 2018, toujours dans un esprit tourné vers l’hospitalité en offrant dans un décor historique un hôtel 5 étoiles, un espace de shopping tendance et une Cité internationale de la Gastronomie au fil d’un parcours imaginé autour de 4 univers traversant dômes, cours et jardins historiques. Entre l’agitation de la rue de la République et le cours du Rhône, on y vient découvrir, flâner et se faire plaisir.

Lyon, place de l’Hôpital oxybis - stock.adobe.com

La place des Terreaux où se dresse l’Hôtel de Ville est bordée de terrasses qui rayonnent autour de l’imposante fontaine Bartholdi dont la dame menant son char représente la France tirée par ses 4 grands fleuves dans un superbe mouvement fougueux. L’opéra surmonté d’une énorme verrière due à Jean Nouvel lors de la rénovation du bâtiment fait la jonction avec la place Louis Pradel, une vaste esplanade aménagée avec des degrés et des cours d’eau juste en face du Rhône.

Place des Terreaux et fontaine de Bartholdi jef 77 - stock.adobe.com

La Croix-Rousse, le quartier des Canuts

Cette commune indépendante lovée sur un plateau à l’extérieur des fortifications de la ville y a été rattachée en 1852 quand les pentes du site se parent d’un réseau dense de maisons hautes avec au moins 4 m de hauteur sous plafond le long de ruelles dénivelées.

Cet habitat particulier a permis aux fameux Canuts d’y installer leurs nouveaux métiers Jacquart du nom de l’inventeur, un Lyonnais qui révolutionna le travail des Canuts. Particulièrement hauts ces métiers vont envahir la plupart des maisons jusqu’aux derniers étages derrière les nombreuses fenêtres qui illuminent les pièces. Les soyeux quittent le quartier de St-Georges et apprivoisent ainsi les pentes de la Croix-Rousse, le nouveau quartier des ouvriers de la soie.

Le Mur des Canuts permet de plonger dans l’histoire de ce quartier. Cette imposante fresque couvre la façade arrière de plusieurs bâtiments sur 1200 m2, de quoi en faire le plus grand mur peint d’Europe. Le trompe-l’œil est efficace, on croit pénétrer dans le quartier des anciens ouvriers immortalisés de surcroit par le visage de vrais habitants du quartier, ce qui explique aussi le lifting qui réactualise cette fresque gigantesque depuis sa création en 1987, le dernier lifting datant de 2013. Pour aller au bout de la compréhension de la vie d’antan de ce quartier, il faut au moins visiter la Maison des Canuts, véritable musée de la soie où des artisans font fonctionner des métiers à tisser, rendant hommage à l’histoire ouvrière de la colline.

Les pentes de la Croix-Rousse.

On peut « trabouler » depuis la jolie place Colbert sur le plateau en s’engouffrant dans la Cour des Voraces qui recèle un escalier monumental à volées droites et paliers qui relient plusieurs cours d’immeubles.

La Croix Rousse ERIC - stock.adobe.com

De passages en escaliers, on peut même descendre jusqu’à la place des Terreaux. On comprend aussi que ces passages couverts permettaient de livrer à l’abri des intempéries les balles de soie aux marchands qui étaient installés tout en bas, dans le quartier des Terreaux.

On peut aussi quitter les passages pour emprunter la Montée dite de la Grande Côte, le plus ancien passage des pentes. D’un palier à l’autre dont certains sont autant de petits jardins on redescend vers la ville en longeant quelques belles maisons crépies de jaune, ocre ou rose qui abritent aujourd’hui des artistes, des boutiques, des cafés et de nombreux enfants qui y jouent durant l’été, loin de toute circulation automobile.

Lyon, ville des temps modernes

L’histoire est toujours en marche avec d’abord l’extension de la ville sur la rive gauche du Rhône et ensuite l’aménagement du tout récent écoquartier de la Confluence qui dessine la pointe de la Presqu’île, là où la Saône rejoint le Rhône.

A début du 20ème siècle, à l’étroit sur la Presqu’île, la ville franchit le Rhône et investit les anciens bras du fleuve qu’on appelle des brotteaux. Aujourd’hui elle s’étire largement autour de la gare Part-Dieu et de la tour du même nom qui de loin fait penser à un crayon.

L’ancienne gare des Brotteaux

Edifiée en 1908, c’était la première gare de Lyon qui permettait de raccorder Paris, Marseille et Genève. Avec ses 153m de long et un bâtiment central de 21m de haut, elle est somptueuse. L’horloge extérieure en est le point de mire et les blasons de la longue frise qui souligne la toiture figurent les villes traversées par la compagnie P.L.M. (Paris-Lyon-Marseille).

Ancienne gare des Brotteaux Leonid Andronov

Toute la charpente métallique recouverte d’ardoises plates est couronnée par des éléments de ferronnerie ouvragés. L’arrivée du TGV va signer l’abandon de cette gare en faveur de la gare de Part-Dieu. Classée monument historique et restaurée, le site a été racheté par un commissaire-priseur lyonnais qui en a fait une prestigieuse salle de ventes dont l’activité est assurée depuis 2008 par son successeur Claude Aguttes.

Le parc de la Tête d’Or, le poumon vert de Lyon

A deux pas de là, imaginez 105 ha d’espaces de détente, tous entièrement gratuits et interconnectés. Le premier dépaysement commence avec un vaste jardin tropical luxuriant dans de belles serres de fonte et d’acier sous une toiture en anse de panier. Tous les continents y sont représentés. Le jardin botanique extérieur s’étire aux alentours avec une impressionnante variété florale. On dit que la volonté du paysagiste était de proposer aux Canuts des modèles de fleurs à reproduire.

Parc de la Tête d’Or christiane65 - stock.adobe.com

Des arbres sont plantés par bouquets et des allées conçues en lacets pour laisser place à de vastes pelouses où s’égayent les promeneurs pour s’y offrir une sieste ou une pause. Un lac de 16 ha attire les amateurs de canotage. Sans transition on se retrouve dans un jardin zoologique où 3 girafes, des lémuriens, des antilopes et un zèbre cohabitent en semi-liberté dans la plaine dite africaine bordée d’un plan d’eau où nagent des pélicans et des flamants roses. Des plaines de jeux et des spectacles de Guignol complètent cette joyeuse escapade qui nous fait presque oublier la ville trépidante toute proche.

La Confluence, la reconversion architecturale de Lyon

A la pointe de la Presqu’île, là où se rencontrent la Saône et le Rhône, s’ouvraient à la fin du siècle dernier 150 ha d’entrepôts vides et abandonnés d’un ancien marché de gros et les docks du port Rambaud qui alimentait jadis la ville en marchandises arrivant par le fleuve.

Quartier de la Confluence Xavier Pastureau

Une situation qui a permis dès 2003 l’éclosion d’un projet urbain de grande ampleur où mixité des bâtiments et des habitants, qualité architecturale, performance environnementale, confort d’usage et qualité de vie ont toujours guidé les architectes pour construire un quartier vivant. Lyon offre ici sa facette résolument avant-gardiste.

La ville autour de la Darse

Un bassin a été creusé pour que la Saône s’invite encore davantage dans la ville, on y trouve une place nautique mais aussi des familles de canards et aux alentours de nombreux bancs pour se poser et admirer ce nouveau paysage urbain. On devine que la plupart des bâtiments se veulent passifs, on découvre surtout des façades et même des toitures végétalisées, des jardins suspendus, des balcons et des terrasses ouverts vers la lumière, des brise soleil à lames orientables… De plus le quartier est maillé de nombreuses stations de transports en commun dont un vaporetto permet de relier en douceur le centre de Lyon tout en offrant une découverte des berges de la Saône.

Des activités médiatiques

Les anciens docks sont devenus un pôle d’activités médiatiques et l’une des vitrines de la reconversion architecturale du quartier. On retient surtout le « rectangle vert pomme », siège de la chaîne de télévision Euronews et le « cube orange », siège du groupe Cardinal, tous deux signés Jakon&McFarlane. La balade piétonne tout comme la piste cyclable qui filent entre les nouveaux bâtiments et des péniches dont certaines sont reconverties en chambres d’hôtes s’avèrent bucoliques et elles débouchent inévitablement sur le Musée des Confluences.

Musée des Confluences

Le Musée des Confluences

Figure de proue à l’entrée sud de la ville pour tous les croisiéristes, au point de confluence de la Saône et du Rhône, la silhouette insolite de ce musée rappelle le Guggenheim de Bilbao en version aplatie. Inauguré en 2014, il mérite l’enthousiasme qu’il suscite. D’emblée on s’étonne quand on y pénètre par le Cristal, cet espace monumental dont l’armature de verre s’élève à 33 mètres, permettant de découvrir par transparence le monde connu. On se laisse absorber ensuite quand on se glisse derrière les portes qui ouvrent les 4 portes de la connaissance. Le musée répond à 4 questions universelles : qui sommes-nous ? d’où venons-nous ? où allons-nous ? que faisons-nous ? Un voyage étonnant entre des centaines d’objets exposés qui tissent des passerelles interpellantes.