En Jamaïque, des tropiques encore plus exotiques

Philippe Bourget,
18-12-2023
Si l’île des Caraïbes possède tous les signes extérieurs de richesse tropicale, avec ses plages bordées de cocotiers et ses hôtels-resorts, elle offre aussi une culture rasta et musicale uniques, une nature foisonnante et la beauté sauvage des Blue Mountains, massif luxuriant où pousse l’un des meilleurs cafés du monde.

 

Du nord au sud, une côte caraïbe aux multiples visages

Située en zone intertropicale, la Jamaïque coche toutes les cases d’un séjour balnéaire réussi. Cela d’autant mieux qu’ici, sur la mer des Caraïbes, il y en a pour tous les goûts. De Montego Bay à Oracabessa en passant par Ochos Rios, la côte nord est de loin la plus touristique.

Plage de Ocho Rios

Le long des 120 km de littoral se concentre la plupart des hôtels-resorts. Comme en « Rép Dom » ou sur la Riviera Maya mexicaine, les marques Zoëtry, Sandals, Iberostar, Bahia Principe… ont pignon sur rue, avec leurs habituelles prestations all inclusive : restaurants de plage, piscines, activités nautiques… et toute l’intendance que recherchent les clients en quête de confort et d’une prise en charge totale de leurs besoins.

Preuve que ce tourisme là a le vent en poupe, un Hard Rock Hôtel doit ouvrir en 2025 à Montego Bay. C’est aussi sur cette côte, à Oracabessa, que se trouve le mythique hôtel Golden Eye Resort. Sur une propriété ayant appartenu jadis à Ian Fleming, le romancier britannique créateur du personnage de James Bond, une quarantaine de villas et de cottages de luxe attend les clients aisés. L’hôtel a été créé par l’actuel propriétaire du site, Chris Blackwell, le légendaire producteur anglais de Bob Marley. Il faut ajouter à ce panorama touristique la station balnéaire de Negril, à l’extrême ouest de l’île. Elle est connue pour son enfilade d’hôtels, restaurants et bars musicaux le long du célèbre 7-mile Beach.

Baigneurs à Treasure Beach, au sud-ouest de l’île © Philippe Bourget ©

Plus authentique, la côte sud-ouest plaira aux touristes cherchant une immersion réellement jamaïcaine. Treasure Beach en est un bel exemple. Les boutiques-hôtels et commerces de cette station balnéaire s’insèrent dans un paysage préservé, constitué de ports de pêche et de petites exploitations agricoles (voir 3/ « Une île intérieure pleine de surprises »). Un hébergement, en particulier, correspond à cette image : le Jakes Hotel. Ses bungalows colorés disséminés sous la végétation en font un lieu d’esprit 100% local.

Le Jakes Hôtel sur la côte sud. © Philippe Bourget

Près de là, à Crawford, on découvrira un espace de nature remarquablement préservé : MalcomBay. La communauté locale protège ce sanctuaire marin, soit près de 5km de côte vierge à mangrove. En bateau à moteur avec les pêcheurs locaux, on pourra y observer lamantins et tortues marines. Il restera à embarquer à nouveau pour aller boire un rhum au Pelican Bar, un « café » de planches sur pilotis situé à quelques encablures du rivage, tenu par le charismatique rasta Floyd.

Bongo Herman, percussionniste jamaïcain et ami de Bob Marley dans la maison-musée de l’artiste à Kingston. © Philippe Bourget ©

Le reggae, Bob Marley et la culture rasta

Qu’évoque la Jamaïque pour celui qui n’y est jamais venu ? Forcément, le reggae et Bob Marley ! Roi de ce genre musical créé dans Trenchtown, un quartier pauvre de la capitale, Kingston, Bob Marley, disparu à 36 ans, reste à jamais le « premier » et une fierté absolue pour les Jamaïcains. Il n’est qu’à voir le nombre de portraits à son effigie, peints sur les murs ou imprimés sur les tee-shirts portés par des hommes dans la rue. Alors si l’on vient à Kingston (1,25 million d’habitants pour 3,2 millions dans le pays), capitale qui n’est plus le coupe-gorge décrit dans les années 80, ce n’est pas seulement pour découvrir la belle demeure d’architecture géorgienne Devon House ou se balader dans Downtown afin d’admirer les œuvres de street art – certaines représentent d’ailleurs des artistes de reggae. C’est aussi et surtout pour visiter la maison-musée de Bob Marley, sur les hauteurs de la ville, près de Jamaica House, la résidence du premier ministre.

La statue de Bob Marley devant sa maison-musée, à Kingston. © Philippe Bourget

On vient de partout en pèlerinage dans ce lieu où toute la vie de l’artiste est exposée. Des photos, des lettres, des disques d’or, des objets personnels, son studio d’enregistrement… s’offrent au public sous les commentaires et les reprises émouvantes des chansons du maître par le guide Ricky, un pur rasta, qui fut ami de Bob Marley. Vous voilà au cœur de la légende – yeah man ! -, avec en prime la présence d’un coffee-shop. Au-delà du musée, la culture rasta reste omniprésente en Jamaïque. Le look caractéristique, avec dreadlocks, bonnet de laine enveloppant aux couleurs de la Jamaïque et spliff de ganja à la bouche, est toujours d’actualité !

Devon House, belle demeure géorgienne, à Kingston, de George Stiebel, « premier Noir millionnaire », à la fin du 19ème s. © Philippe Bourget

Pour continuer l’expérience, on pourra séjourner au Jakes Hôtel . L’établissement abrite deux restaurants, dont le célèbre Jack Sprat. Dédié au reggae et à Jimmy Cliff, il rappelle que l’hôtel est la propriété du fils du réalisateur jamaïcain Perry Henzell, qui a tourné un film dans lequel le célèbre musicien de reggae, toujours en vie, a joué. Pour aller encore plus loin, on ne manquera pas le détour par le Rastafari Indigenous Village, l’un des derniers camps retranchés rastafariens de l’île. Près de Montego Bay, dans un bout de vallée perdue à l’écart d’une « Babylone » qu’ils considèrent comme dévoyée, une poignée de rastafaris y vit d’autosuffisance, entre musique kumina (à base de percussions), nourriture végétarienne et spliffs – cigarettes de ganja. Si le cœur vous en dit, on peut même y effectuer une retraite, dans des bungalows conçus pour les touristes.

Belle maison-hôtel dans les Blue Mountains. © Philippe Bourget ©

 Une île intérieure pleine de surprises

Cascades et vasques pour se baigner, rivières à descendre en bateau, en radeau ou en canyoning, visite de fermes locales et découverte de spécialités culinaires… La découverte de la Jamaïque « intérieure », au-delà du cas des Blue Mountains est une mine d’or.

Blue Hole, à Island Gully Falls, un des sites naturels les plus beaux de Jamaïque. © Philippe Bourget ©

Au sud-ouest, entre Treasure Beach et Black River, la végétation raréfiée et une terre riche a fait émerger à une petite économie paysanne. Au pied des Santa Cruz Mountains, des tours en scooters accompagnés permettent d’aller à la rencontre de fermiers. On en croise plusieurs, occupés à surveiller dans les champs autour de leurs cases en bois la croissance du coco (une grosse tubercule), du thym (!), des pears (avocats), des sauer soaps, des naseberries, du jum plum… Tout ou presque pousse dans ce secteur, considéré comme l’un des « jardins maraichers » de Jamaïque.

Dans les Blue Mountains… © cms ©

Plus loin dans ces terres du sud-ouest, on s’arrêtera à Middle Quarters pour déguster sur le bord de la route les pepper schrimps, des crevettes pêchées dans la rivière locale, assaisonnées au poivre. Pour le fun, on ira sur le site des YS Falls, un ensemble de cascades rafraîchissantes qui dévalent le long d’un bras de la Black River, aménagée ici avec des bassins et des gazébos (pavillons de jardin) pour le pique-nique. Pour le frisson, on poussera jusqu’au port de pêche de Black River, histoire de naviguer sur la rivière éponyme et d’observer de rares oiseaux ainsi qu’une colonie de crocodiles. Si l’on aime le rhum, bonne pioche ! La Jamaïque en produit et deux distilleries, notamment, ouvrent leurs portes aux touristes : Hampden Estate, près de Falmouth (nord-ouest) et Appleton Estate, proche de Santa Cruz (centre-ouest). Dans un décor digne du 19ème s., la première produit un pure single d’excellence et présente aussi dans sa boutique… une paire de chaussures d’Usain Bolt. Le champion jamaïcain, voisin originaire de Falmouth, les a dédicacées et offertes à la fabrique.

Descente en radeau de bambous de la Martha Brea River, au nord-ouest de l’île. © Philippe Bourget ©

Au nord-est de l’île, les distractions dans les vallées intérieures ne manquent pas non plus. On dénichera avec peine, dans les hauteurs d’Ocho Rios, le vrai Blue Hole, un trou d’eau d’un bleu intense, réceptacle d’une cascade s’échappant d’une rivière de montagne. Le site, nommé Island Gully Falls, est de toute beauté et bien équipé. A l’orée du Cockpit Country, l’un des territoires les plus isolés de Jamaïque, au nord-ouest de l’île, on testera la descente en radeau. Sur la Martha Brae River, des bateliers, comme dans l’ancien temps, font glisser leur embarcation légère sur la rivière ombragée, en poussant sur une longue perche en bois. Comme touriste, c’est une façon originale de s’immiscer dans les replis de la forêt

Un village perché dans les Blue Mountains. © Philippe Bourget ©

Les Blue Mountains, fertile forêt pluviale

On peut sans complexe mettre cette région à part tant elle concentre un maximum d’intérêts naturels et culturels particuliers. Situé à l’est de l’île, dominant Kingston, ce massif montagneux culminant à 2 256 m d’altitude est difficile d’accès. Depuis la capitale, de mauvaises routes étroites et tortueuses partent à l’assaut des versants, grimpant au milieu d’une végétation qui semble vouloir avaler le bitume. Luxuriantes et noyées de brumes, soumises à des pluies soudaines et violentes, les Blue Moutains se prêtent aux randonnées et aux trails, en particulier dans le Blue and John Crow Mountains National Park. Sous un air frais agréable qui fait oublier la chaleur étouffante de Kingston, à 1 250 m d’altitude, quatre trails sont accessibles aux marcheurs depuis l’une des entrées du parc, nommée Holywell. Ce sera l’occasion de croiser deux des symboles du pays : l’arbre national, le Blue Mahoe, une variété d’hibiscus ; l’oiseau  national, le Red-billed Streamertail, un colibri.

Cueillette du café © Philippe Bourget ©

Les Blue Mountains sont aussi la région du café. Et quel café ! La variété d’arabica qui pousse ici est l’une des plus chères du monde et produit un café doux mais fort en goût et dépourvu d’amertume. Plusieurs fermes caféières se visitent, comme l’UCC Blue Mountain Coffee Craighton Estate, à Irish Town. Les balades dans les plantations permettent en prime de profiter de vues panoramiques superbes sur la capitale et la côte. Quelques hôtels et lodges, disséminés sur les hauteurs, offrent l’occasion de passer une ou deux nuits hors du temps.

Les cascades de Blue Mountains

Cette « jungle amicale » cache aussi d’autres surprises. On sera étonné d’apprendre que le massif abrite encore des villages « marrons », du nom de ces descendants d’esclaves échappés jadis des plantations, réfugiés dans les hauteurs et vivant en communautés. On pourra vivre aussi l’étonnante expérience d’un petit-déjeuner au Pretty Close 876, à Gordon Town. Il s’agit d’un « restaurant » aménagé sous une case, posé au creux d’un torrent, dans une vallée cachée des Blue Mountains. On y déguste, sur réservation, une excellente cuisine traditionnelle i-tal (végétarienne). Aller dans les Blues Mountains, c’est découvrir un nouveau pays !

Infos
Office de tourisme de la Jamaïque. visitjamaica.com

Y aller
Vol TUIFLY au départ de Bruxelles vers Montego Bay, le jeudi. tuifly.fr

Formalités
– Il est nécessaire de compléter un formulaire en ligne pour l’Immigration et les Douanes avant le départ. enterjamaica.com
– Décalage horaire : en hiver – 6 h ; en été – 7 h.
– Monnaie : le dollar jamaïcain (JA$). 1€ = env. 164 JA$. On peut aussi payer en dollars US.
– Electricité : Prévoir des adaptateurs avec 2 pôles plats.