Ancienne route vers la Méditerranée, la Régordane mêle histoire, légendes et randonnées sur un tracé devenu le GR 700.
Saint-Gilles © marie-lou-wechsler
Le chemin de Régordane, aujourd’hui GR 700, était autrefois une grande route partant de l’Île-de-France pour rejoindre le Languedoc et la mer Méditerranée. Il passait par le col de Villefort, entre le mont Lozère et le Mas de l’Aire. Une sorte d’autoroute du Sud médiévale, en quelque sorte…
843 : le moment où tout change
En 843, le traité de Verdun sépare l’Empire carolingien. Résultat : la Régordane devient la route la plus à l’est du royaume, et mène directement à Saint-Gilles, un port très important à côté d’Arles. Le chemin devient ensuite un grand itinéraire de pèlerinage. À Saint-Gilles, l’activité était incroyable : 124 changeurs de monnaie y travaillaient. Un record européen pour l’époque. Puis l’ouverture d’Aigues-Mortes à la mer met fin à cette prospérité.
Pourquoi “Régordane” ?
Le mot viendrait peut-être de gorg (gorge, gouffre), ce qui rappelle bien les paysages encaissés du trajet. D’autres pensent que cela vient de regor, un agneau né hors saison, qui descendait les drailles avec les troupeaux.
L’âge d’or… puis le déclin
XIIe–XIIIe siècles : tout roule
Les routes s’améliorent, on construit des ponts, on pave les zones difficiles. Le commerce se développe fortement. Des textes comme Le Charroi de Nîmes montrent l’importance de la Régordane.
XIVe siècle : tout ralentit
Lorsque les frontières se déplacent vers le Rhône, les voyageurs changent d’itinéraire. Le climat se refroidit, les récoltes chutent, les épidémies frappent : la route perd son utilité et n’est plus entretenue.
XVIIe siècle : une route d’un autre âge
En 1668, Louis de Froidour parcourt le chemin et le décrit comme un passage rude et compliqué pour les charrettes. Il y croise les Rigourdiers, muletiers transportant du vin. Le projet de réaménager la route ne motive pas grand monde.
XIXe siècle : une nouvelle route prend le relais
On construit une nouvelle voie plus large, avec 650 virages entre Pradelles et Alès. L’ancienne route est alors laissée de côté et se dégrade.
Le GR 700 : la Régordane devient une rando
Aujourd’hui, la Régordane renaît sous la forme d’un sentier de randonnée long de 242 km. Il traverse la Haute-Loire, l’Ardèche, la Lozère et le Gard, en passant par des villages emblématiques : Pradelles, La Garde-Guérin, Villefort, Génolhac, Portes, Alès, Nîmes et bien sûr Saint-Gilles. Le GR 700 ne suit pas toujours exactement l’ancien tracé, mais il en garde l’esprit : paysages sauvages, histoire, villages perchés et ambiance cévenole bien marquée.
Nïmes © lukas-ulmer
Bon à savoir pour les randonneurs
Préparer son itinéraire
Le GR 700 peut se parcourir en une dizaine de jours selon le rythme. Les étapes sont assez régulières, mais certains tronçons — notamment autour de Villefort ou de La Garde-Guérin — sont plus physiques.
Quand partir ?
Pour éviter la chaleur, les touristes et la fraicheur de début et de fin saison, on dira début mai et fin septembre, début octobre. Evitez absolument l’été, les touristes et la chaleur transformeront votre randonnée en calvaire. En hiver, il peut y avoir de magnifiques journées, mais il peut y faire très froid le matin et le soir !
Pradelles © lucile-noiriel
Hébergements et ravitaillement
On trouve gîtes, campings et chambres d’hôtes dans la plupart des étapes. Les villages cévenols sont accueillants mais petits : mieux vaut réserver en haute saison. Pour le ravitaillement, prévois large entre La Bastide-Puylaurent et Génolhac, les services étant plus espacés.